Jérôme arrive mercredi soir, il est temps de trouver un petit programme avec cette météo variable.
Tout y passe de la Suisse avec des courses d’arête, des couloirs de neige, des goulottes à Chamonix, un peu de grimpe au Verdon…
Finalement, la Vanoise l’emporte, direction la grande Casse et le couloir des Italiens.
Il y a de la neige en altitude, ça va être bon, ensuite peut-être une arête S de la glière….
La montée en refuge calme le jeudi avec la préparation matos, se déroule sans encombre.
Tout nouveau tout beau, le refuge du col de la Vanoise brille de mille feu, la chaleur du bois en plus.
Réveil à 2h30 ce matin, la nuit fût courte et il est difficile de se sortir des couettes douillettes… un petit déjeuner plus tard.
Nous voilà dehors, il fait tout juste zéro ; pas bon pour le regel, de fait après seulement quelques pas je m’en fonce jusqu’aux genoux dans cette neige lourde et humide… la joie, je sens que la journée va être longue.
On se relaiera pour la trace, en fonçant chacun à notre tour dans cette neige, digne d’un mois d’hiver.
On mettra 3 h pour arriver au col de la grande casse au lieu de 1h30-2h.
Là on fait le point sous le sol rasant qui nous réchauffe doucement.
On va tenter le coup, après tout on est là.
La trace reste profonde, elle le sera toute la journée, c’est le thème de cette ascension.
On brasse, on s’enfonce, on se relaie, on arrive enfin sous les séracs, à l’abris des gros morceaux menaçant. La pause s’impose toutes les deux heures ils disaient sur les panneaux routiers.
On est dans la face N pourtant le soleil donne bien, une seule couche suffit, elle est même presque de trop, nous voilà en train de transpirer à grosses gouttes.
On traverse aussi vite que possible sous les séracs, tels deux escargots traversant l’autoroute, 45 minutes sous ces géants, pas cool comme situation mais la neige nous empêche d’avancer vite.
Nous sommes enfin dans l’axe du couloir, ça monte, la glace fait son apparition, on fait des longueurs avec 2-3 broches sur les 150 derniers mètres.
Encore un peu de corde tendue pour sentir, la corniche est là, tel la dernière sentinelle nous privant du sommet.
On cherche le point de faiblesse, une poussée aux fesses pour passer le dernier mètre… nous voilà sur l’arête final.
3850m on est au sommet, on a rejoint une cordée qui montait par les grands couloirs, la joie, la fatigue tout se mélange.
Je me concentre pour ne pas me laisser déborder par mes émotions, les derniers pas sont vraiment une libération de bonheur.
Cette course restera marquée pour longtemps.
La descente nous réservera encore une bonne surprise sur la moitié finale avec une neige lourde et humide dans laquelle on s’enfoncera de nouveau tel des marécages de la Floride, nous ralentissant et nous privant de la bière.
Merci à Jérome…